II. Le composé
3. les formes galéniques 4. Quelques autres composés salicylés 5. Quelques aspects de la synthèse industrielle
III. Mode d’action
2. Action de l’aspirine sur la cyclo-oxygénase 3. Aspirine : faits et perspectives 4. Elimination de l’aspirine au sein de l’organisme
Actualité du médicament 1. Historique 2. Les concurrents de l’aspirine 3. Vers de nouveaux anti-inflammatoires 4. L’aspirine : un espoir pour de nouvelles maladies
V. Sources bibliographiques HISTORIQUE
Il y a vingt-cinq siècles, Hippocrate, le père de la médecine, conseillait une tisane de feuilles de saule blanc - salix alba - pour soulager douleurs et fièvres. Les feuilles de saules figuraient déjà 1.500 ans plus tôt dans la pharmacopée sumérienne, comme en témoignent les recommandations inscrites sur le papyrus d’Ebers. Le saule blanc concurrençait alors deux autres plantes : le jusquiame et le pavot, utilisées comme antalgique. Au premier siècle de notre ère, Celse utilisait des extraits de feuilles de saule pour atténuer les manifestation de l’inflammation ; Discoride recommandait une décantation de feuilles de saules pour la goutte. Pour lui, le saule était également hémostatique et contraceptif. Ecorce, feuilles, sève et chattons du saule étaient utilisés pour leur vertus médicinales en Chine, en Afrique du Sud et en Amérique précolombienne. Au Moyen-Âge, les fleurs de la reine des prés étaient utilisées avec les mêmes indications thérapeutiques. L’utilisation empirique du saule s’est poursuivie au cours des siècles. Très employé comme anaphrodisiaque, il fut réputé fébrifuge au XVIIIe siècle. Le 26 avril 1763, Edward Stone, pasteur du comté d’Oxford rapporte sa lettre au président de la Royal Society : « Le succès de l’écorce de saule dans le traitement des fièvres ». Selon la théorie des signatures – un des dogmes médicaux de l’époque – le remède d’une maladie n’est jamais loin de ses causes. E. Stone était frappé par le fait que les saules poussaient dans les endroits humides et marécageux, où les maladies fébriles étaient fréquentes. Le saule était devenu un sujet d’étude digne d’intérêt.
Edward Stone (1702-1768) – révérend anglais – exerçait son sacerdoce à Chipping Norton (Oxford - Shire). Il avait goûté par hasard cette écorce de saule dont l’amertume lui avait rapporté celle du quinina qui permettait de soigner à l’époque tant bien que mal les crise de malaria.
Il fallut attendre le XIXe siècle, avec l’essor de la chimie d’extraction et de synthèse, pour découvrir et isoler le principe actif de l’écorce de saule. En 1825, l’amertume de l’écorce de saule était reconnu par Fontana comme étant due à la salicine. En 1828, à Munich, Büchner isolait quelques cristaux en aiguilles, de goût amer ; il avait préparé la salicine. En 1829, à Paris, Leroux améliorait le procédé d’extraction et obtenait une once (30 g) de salicine à partir de 3 livres (500 g) d’écorce de saule. Il démontra aussi son effet thérapeutique. En 1833, à Darmstadt, Merck trouvera un procédé d’extraction deux fois moins coûteux.
Le procédé qu’utilise Pierre Josef Leroux (1795 – 1870) – un modeste pharmacien installé à Vitry le François – pour extraire le principe actif contenu dans les écorces de saule ressemble à une bonne vieille recette de cuisine. On fait sécher des écorces se saule, on les concasse, les pulvérise et on fait bouillir un kilogramme et demi de la poudre obtenue pendant plusieurs heures dans 10 litres d’eau. On filtre le liquide dans un ligne en pressant bien le résidu. Ce qui suit devient un peu plus chimique. On ajoute à ce jus des sels de plomb qui ont pour effet de rassembler les tanins et de coaguler certaines autres substances indésirables qui s’y trouvent dissoutes. Après avoir de nouveau filtré les parties solides, on concentre une fois de plus le liquide. Par évaporation progressive de ce jus, on voit peu à peu se former des cristaux d’un blanc nacré. On les recueille. Pour les purifier, on les fait à nouveau recristalliser plusieurs fois dans de l’eau pure. A partir de son kilogramme et demi d’écorces, Leroux isolait une trentaine de gramme d’une substance pure qu’il baptise Salicine, à cause du nom latin du saule, Salix. Triomphant de ces difficultés et malgré les moyens primitifs dont il disposait, le pharmacie Leroux était donc parvenu à isoler ce qu’il pensait être le « produit actif » de l’écorce de saule. Encore fallait-il s’en assurer, vérifier que cette salicine jouit réellement de propriétés fébrifuges revendiquées 60 ans plus tôt par le clergyman anglais. Des expériences immédiatement tentées sur de malades des hôpitaux parisiens (Hôtel-Dieu, Charité) furent concluantes. Les médecins confirmèrent qu’elle « coupait les fièvres du jour au lendemain et ceci quel que soit leur type ». La Salicine se montrait efficace.
En 1835, le suisse Löwig cristallisa un composé nommé Spiersäure à partir de la Reine-des-prés (Spirae ulmaria) mais il faudra attendre 1839 pour que le chimiste français Dumas démontre que le Spiersäure n’est autre que l’acide salicylique ! Entre temps, en 1838, Piria isole à Paris l’acide salicylique de la salicine.
« On fait fondre de la potasse caustique dans une bassine d’argent et on ajoute, par petites portions, en agitant le mélange, la salicine. L’opération terminée, quand la masse est bien refroidie, ajoutons-y plus prudemment encore, de l’eau puis de l’acide chlorhydrique. Un précipité blanc se forme aussitôt dans la solution jusqu’ici homogène. Le composé qui apparaît est de l’acide salicylique »
L’acide salicylique sera à nouveau préparé aux Etats-Unis. Il existe en effet une sorte de bruyère qui pousse en Amérique et que les botanistes appellent Gaultheria Procumbens. Les Gaulthéries sont des arbrisseaux toujours verts ; les feuilles de la variété connue sous le nom de thé du Canada fournissent, après macération et distillation, une essence dite essence de Wintergreen, depuis longtemps utilisée comme antiseptique et antirhumatismal. Son odeur est très particulière : c’est celle que l’on retrouve dans certaines pommades, embrocations et autres liniments recommandés contre les douleurs. Cette essence naturelle est constituée à 90% par du salicylate de méthyle. En 1840, un chimiste américain constata que, traité par un alcali, l’essence de Wintergreen se transforme en acide salicylique. En 1853, Charles Gehrardt, de la faculté de Montpellier, réussit la synthèse de l’acide acétylsalicylique, mais son travail resta inexploité pendant 45 ans !
Il ne fait guère de doute que c’est le chimiste français C. Gehrardt (1816 – 1856) qui, le premier, a eu entre les mains de l’acide acétylsalicylique, vraisemblablement très impur. A vrai dire, il ne l’avait pas fait vraiment exprès : en faisant réagir un dérivé de l’acide acétique sur la salicylate de soude, il espérait obtenir un représentant supplémentaire d’une nouvelle série de composés qu’il venait de découvrir : les anhydride d’acides. Un jeune chimiste qui préparait, en 1859, sa thèse de doctorat dans un laboratoire de l’université d’Innsbruck reproduisit la même réaction. Même travaux pour K. Kraut, un autre chimiste. Toutefois, l’acide acétylsalicylique n’était qu’un produit chimique de plus parmi des milliers d’autres, perdu dans le nombre de ceux que les chimistes préparent quotidiennement pour des raisons les plus diverses.
En 1860, Hermann Kolbe de l’université de Marburg synthétisa l’acide salicylique et son sel de sodium. En 1874, à Dresde, un de ses élèves, F. von Heider, ouvrit la première grande usine de synthèse de dérivés salicylés.
Le procédé de Kolbe (1818 - 1884) consiste à faire barboter du gaz carbonique dans du phénol et de la soude (à cette époque, on savait déjà obtenir facilement le phénol – l’acide phénique, comme on disait alors – à partir des goudrons de houille). Kolbe n’avait pas essayé cette transformation complètement par hasard, mais la théorie qui le guidait était en partie fausse. Une observation exacte était cependant à l’origine de sa découverte. Il savait que le phénol et le gaz carbonique ont certainement une relation avec la composition de l’acide salicylique.
En 1874, un médecin écossais T.S. Mac Lagan, traite un cas de fièvre rebelle par l’acide salicylique avec un succès inattendu. En 1876, la même expérience menée sur des malades atteins de rhumatismes articulaires aigus connaît le même succès étonnant. L’acide salicylique possédait incontestablement une action contre la fièvre et la douleur, mais il provoquait sur les muqueuses stomacales des effets irritants, en particulier des brûlures d’estomac. En 1877, à Paris, Germain Sée introduisit le salicylate de sodium pour traiter la goutte et les polyarthrites chroniques. Efficace contre la fièvre, la douleur et l’inflammation, ce médicament se révèle moins agressif que l’acide salicylique. Dans les années 1880, l’efficacité des médicaments salicylés n’était plus discutée. Le salicylate de sodium réputé moins toxique que l’acide salicylique était le plus employé. Mais il était peu apprécié en raison de sa saveur amère très désagréable. Une solution à ce problème existait déjà depuis 1853. Gerhardt avait en effet noté par une méthode très laborieuse que l’acétylation de l’acide salicylique donnait un composé à la saveur beaucoup moins désagréable. En 1897, Félix Hoffmann, jeune chimiste de la société Bayer, trouva une méthode de production plus simple qui ouvrit a voie à la production industrielle de l’acide acétylsalicylique. Cette nouvelle substance avait une saveur acidulée non désagréable et paraissait moins agressive sur la muqueuse stomacale. Les premières études expérimentales démontrèrent la supériorité de ce nouveau composé sur l’acide salicylique et le salicylate de sodium.
Le 1er février 1899, la compagnie rhénane Bayer lança sur le marché un nouveau produit :
A - pour acétyl ; spir - pour Spiersäure ; in - comme suffixe classique en pharmacopée.
LE COMPOSE a) Propriétés chimiques de l’acide salicylique
L’acide salicylique – alias acide 2-hydroxybenzoïque – se
présente sous la forme de fines aiguilles formant une poudre cristalline incolore, de saveur douceâtre, puis acide et désagréable. M
Chauffé doucement, l’acide salicylique se sublime en longues aiguilles lamellaires ; chauffé brusquement, il se décompose en anhydride carbonique et en phénol d’odeur caractéristique. La vapeur d’eau l’entraîne à la distillation. Chauffé sur une lame de platine, l’acide salicylique se volatilise sans laisser de résidu et en répandant une odeur de phénol. Traité à froid par de l’acide sulfurique concentré, l’acide salicylique se dissout sans se colorer. 10 mL d’une solution aqueuse à 1% se colorent en violet par un goutte de chlorure ferrique dilué à 2,6% ; cette coloration disparaît par addition de quelques gouttes d’un acide minéral fort. L’acide salicylique, bien que peu soluble dans l’eau, lui communique une réaction franchement acide (pH = 2,6). Il est soluble dans la lessive de soude diluée. On trouve l’acide salicylique naturellement dans le polygala et dans la fraise.
b) Synthèse de l’acide salicylique
! Distillation des matières premières pétrochimiques (benzène et propylène) (On peut aussi catalyser les réactions sur zéolithes)1ère étape : Alkylation 2ème étape : Trans-Alkylation
Après lavage à l’eau du catalyseur, le mélange réactionnel brut est purifié par distillation :
1 - Distillation des légers (alcanes - eau) 2 - Distillation du benzène (recyclé à l’alkylation) 3 - Distillation du cumène → celui qui nous intéresse ici 4 - Distillation des lourds (poly-isopropylbenzène)
1ère étape : Oxydation à l'air du cumène 2ème étape : Scission de l'HPOC
! La réaction de Kolbe-Schmidt : synthèse de l’acide salicylique La synthèse de l’acide salicylique consiste à faire agir CO2 anhydre sur le phénolate de sodium sec, à chaud et sous pression.
• La première synthèse fut mise au point par H. Kolbe (1818 – 1884) en 1859 : elle
consiste à faire agir le gaz carbonique sur le phénolate de sodium à sec et à chaud (180°C). On admet alors l’addition de CO2 sur le phénolate avec formation de salicylate de sodium, qui, en raison de la température, réagit sur une autre molécule de phénolate en déplaçant le groupe phénol. Rdt : 50 %.
• La synthèse de Kolbe fut améliorée par R. Schmidt (1830 – 1898). On fait agir
CO2 sec sous pression (4 – 7 atm.) sur le phénolate de sodium sec à température ordinaire. On constate alors l’absorption de CO2 par lé phénolate. On chauffe ensuite à 120-140°C sous pression de CO2. La totalité du phénol sodé est alors transformée en salicylate de sodium (Rdt : 95-98 %). Après reprise de l’eau, l’acide est précipité par H2SO4. Il est purifié par sublimation.
Carbonatation du phénolatpuis neutralisation à l'acide
La fixation d’anhydride carbonique se fait en ortho sur le dérivé sodé du phénol. Le dérivé potassé favoriserait la fixation en para. 2. L’acide
a) Propriétés chimiques de l’acide salicylique
L’acide acétylsalicylique – alias acide acétoxy-2-benzoïque –
se présente sous la forme de paillettes ou fines aiguilles
incolores, brillantes, à saveur acide, très peu soluble dans l’eau
(1/300) et qui s’hydrolysent peu à peu en solution aqueuse.
Tfusion lente = 134 à 138°C, Tfusion instantanée = 141 à 144°C,
L’acide acétylsalicylique présente une réaction acide au tournesol ; il se dissout rapidement dans les alcalis qui le saturent d’abord, puis le saponifient en fournissant un mélange d’acétate et de salicylate alcalin (KA= 3,3.10-4 – pKA = 3,48). Portez à ébullition pendant quelques minutes environ 0,5 g d’acide acétylsalicylique et ajoutez 10 mL d’acide sulfurique dilué à 20% ; il se forme un précipité blanc d’acide salicylique et une légère odeur d’acide acétique est perceptible. Filtrez. Au filtrat, ajoutez 3 mL d’alcool officinal et 3 mL d’acide sulfurique concentré. Chauffer : il se dégage une odeur d’acétate d’éthyle. Dissolvez quelques mg de précipité dans 10 mL d’eau et ajoutez une à deux gouttes de la solution de chlorure ferrique : il se développe une coloration violette.
b) De l’acide salicylique à l’acide acétylsalicylique
On prépare l’acide acétylsalicylique entre l’acide salicylique et l’anhydride acétique. La réaction est une estérification de la fonction phénol de l’acide salicylique par l’anhydride acétique. On ajoute au mélange des deux réactifs une petite quantité d’acide sulfurique concentré.
Voir Annexe : TP – Synthèse de laboratoire.
c) Caractérisation analytique du composé
L’acide salicylique possède une fonction phénol. En présence d’ions Fe3+, il y a apparition d’une coloration violette due à la formation d’un ion complexe de type [Fe(OR)4]-. La coloration a pour origine un transfert de charges à l’intérieure de l’ion complexe, favorisé par la nature aromatique de R. Le solvant utilisé ici est l’eau ; certains solvants comme le chloroforme, le tétrachlorure de carbone ne permettent pas de mettre en évidence la coloration violette. En revanche, d’autres solvants donneront des couleurs différentes (rouges dans l’acétate d’éthyle) ; on peut dire dans un cas général que la coloration n’apparaît pas si le groupement -R est aliphatique.
La caractérisation de la fonction phénol par cette méthode est connue depuis plus d’un siècle. Elle est simple et rapide ; elle sera utilisée pour caractériser le produit formé au cours de sa synthèse. ⇒ Un test caractéristique de la fonction phénol met en évidence la présence ou l’absence de cette fonction dans le produit étudié.
! Par acétylation de l’acide salicylique, la fonction phénol disparaît. L’aspirine doit
donc donner une réponse négative à ce test ;
! Saponifions l’acide acétylsalicylique par de la soude, la fonction phénol se
reforme. Le test aux ions Fe3+ doit être positif. On aura ainsi caractérisé le produit obtenu ou tout au moins ces observations seront cohérentes avec la structure attendue.
On peut également caractériser l’acide acétylsalicylique par sa fonction acide :
Voir Annexe : TP – Dosage direct de l’aspirine par la soude.
Une méthode plus performante de caractérisation consiste à utiliser les méthodes spectrométriques d’analyse.
3. Les formes galéniques On trouve au sein d’un comprimé ou d’un sachet d’aspirine non seulement le principe actif du médicament, responsable des propriétés thérapeutiques (ici , l’acide acétylsalicylique). Toutefois, l’acide acétylsalicylique n’étant pas administrable à l’état pur, les industriels combinent ce principe actif au sein de ce qu’on appelle les excipients. Excipient vient de latin excipere (recevoir). Les excipients sont des substances auxiliaires, neutres pour l’organisme, ajoutée au principe actif pour assurer plusieurs fonctions : assurer la mise en forme et le dosage du principe actif pour le rendre assimilable ; véhiculer le médicament jusqu’au site d’absorption ; moduler la libération du principe actif dans l’organisme. ; améliorer le goût du médicament administré par voie orale ; répondre aux besoins technique de fabrication. La qualité exigée des excipients est leur inertie vis-à-vis du principe actif, du matériau de conditionnement et de l’organisme. Les principaux excipients peuvent entrer dans la composition des formes galéniques sont des diluants, tels que saccharose, lactose ; liants, déliants ou agents de désagrégation, lubrifiants, tels que benzoate de sodium ; acides ou bases participant au pouvoir tampon de la solution, tels que glycine, carbonate de sodium, citrate de sodium (diacide) ; arômes ; édulcorants, tels que l’aspartame, saccharine … Les indications indiquées sur les boîtes de médicament sont réglementées. On doit, entre autres, indiquer la composition en principe actif (nature et quantité). La nature et la quantité des excipients n’est pas précisée (à moins qu’ils aient une action particulière sur l’organisme). Le sigle « q.s.p. » signifie : quantité suffisante pour une unité de médicament ({principe actif + excipient}). Exemple : Solupsan 160 mg - carbasalate calcique (203,52 mg ≡ 160 mg d’aspirine)
acide citrique anhydre : effervescence (à pH = 4,5) ;
carbonate de lysine : effervescence (à pH = 4,5) ;
citrate de magnésium anhydre : « déshydratation » ;
Historiquement, c’est à la toxicité pour l’estomac que les pharmacologues se sont d’abord attaqués. Présentée à l’origine comme une présentation magistrale de poudre blanche (voir photo), l’Aspirine fût dès 1904 conditionnée sous la forme de comprimés dans des tubes de verre. Ces comprimés d’origine – dits « simples » - sont fabriqués par agglomération de particules relativement importantes d’aspirine et d’excipient comme l’amidon ; or, ces particules, insolubles dans l’eau, ont une action corrosive vis-à-vis de la muqueuse gastrique. Cet inconvénient majeur contraint les fabricants à imaginer de nouvelles formes pharmaceutiques pour réduire le plus possible le temps de contact entre les particules d’aspirine et la muqueuse gastrique, voire modifier le lieu d’absorption du médicament en le faisant absorber par la muqueuse intestinale.
L’excipient est ici l’amidon (10 à 20%). Il se gorge d’eau et fait se disperser les cristaux d’aspirine. Inconvénient, tout se retrouve dans l’estomac # !
L’excipient est conçu pour libérer l’aspirine dans les zones intestinales (pH = 8). Le cétophtalate de cellulose donne un composé dur qui supporte l’acidité de l’estomac et qui se
désagrège par les enzymes intestinales plus basiques. On appelle ces aspirines à effet retard avec libération au bout de trois heures.
On parle ici d’aspirine micro-encapsulée ; chaque grain de la capsule est dosé avec un pH différent, ce qui permet une libération prolongée (de pHestomac = 2 à pHintestin = 8). Cette libération se fait pendant trois heures.
La forme est ici soluble directement car on passe ici par la forme ionique de l’ion acétylsalicylate. Ce dernier n’a pas d’effet thérapeutique mais avec le pH acide de l’estomac, il repassera par la forme acide : l’aspirine. Considérant que l’équilibre est total, l’estomac doit pouvoir assimiler toute la quantité d’aspirine d’un coup. En général, l’acétylsalicylate est lié avec de la lysine qui présente un effet tampon (pKA = 2,20 – 8,90 et 10,2 à 38 °C)
Du fait de la présence de la lysine, les proportions se trouvent changées. Exemple : « Aspégic® enfants nourrissons » - acétylsalicylate de lysine = 180 mg correspondant à 100 mg d’aspirine.
Les deux excipients majoritaires sont l’acide citrique et le bicarbonate de sodium. Lorsqu’on la met dans l’eau :
Ce gaz libéré, relativement important, a trois fonctions :
sécurité pour les enfants : réaction d’effervescence désagréable
- Le gaz se libère aussi dans l’estomac et, par pression, accélère la vidange
gastrique. Ainsi, l’aspirine reste moins longtemps dans l’estomac.
Pour ce genre de médicaments, on trouve les proportions suivantes :
dihydrogénophosphate de calcium : 0,20 g
L’intérêt de la forme tamponnée est de pouvoir fixer la proportion entre l’aspirine (AH) et son conjugué (A-). Par exemple, lorsque la firme UPSA choisit de tamponner son aspirine à pH= 5,8, elle régule par là le pourcentage d’AH et d’A-.
Le conditionnement de l’aspirine dans nos pays se fait avec de petites boules de dessicant placées dans le bouchon pour éviter la réaction d’hydrolyse. Dans les pays équatoriaux surtout, la conservation de l’aspirine ne peut se faire si facilement. On favorise donc la forme injectable. Cette forme est également utilisée en milieu hospitalier pour plus de simplicité.
Utilisée en Angleterre et en Allemagne
Elle est impossible du fait de l’hydrolyse possible du composé. Il faudrait alors passer par une forme alcoolique … Toutes ces formes galéniques différentes sont l’objet de prescriptions adaptées. Ainsi les formes comprimé et poudre ont un effet immédiat mais leur irritation sur l’estomac est plus forte. Les aspirines à effet retard (pH8, gélule) seront administrées plutôt dans le traitement de douleurs rhumatismales. Les formes effervescente et tamponée seront plutôt utilisées par des personnes à l’estomac fragile. Remarque : réduire les formes galéniques à ces simples constatations serait naïf ; le problème est bien plus profond. En effet, les formes galéniques optimisent certaines indications thérapeutiques mais c’est actuellement sur le dosage que les recherches se penchent. L’aspirine inhibe la synthèse des prostaglandines ; or, en jouant sur la quantité de produit, son lien et sa vitesse de libération, on inhibe plutôt certains types de prostaglandines. Ainsi, les industriels essayent de doser harmonieusement ces trois facteurs pour optimiser l’effet thérapeutique face à un mal (Ex. : UPSA – Aspirine 335 mg – le dosage est étonnant – le produit est sorti en décembre 1995 sur le marché.) 4. Quelques autres composés salicylés
On a prétendu que l’effet de la médication salicylée serait conditionnée par sa transformation en acide gentisique et on a préconisé l’usage de ce dernier corps en thérapeutique. En fait, l’acide gentisique ne représente qu’une faible fraction des métabolites de l’acide salicylique. Le métabolite majeur est constitué par le salicylate dont la formation est l’étape limitante de la dégradation et de l’élimination de l’acide salicylique. Ce fait rend compte de la persistance prolongée dans l’organisme des doses importantes de salicylate. Le salicylate de méthyle est une huile volatile d’odeur caractéristique, incolore, principe actif de l’huile de Wintergreen, retirée du Thé du Canada (Gaulthérie) et de l’écorce de bouleau. Il est surtout employé à titre externe comme révulsif. C’est Lehman qui a établi en 1946 les propriétés tuberculostatique de l’acide amino-4-hydroxy-2-benzoïque (acide para-aminosalicylique). On pense que cet effet s’explique par une action anti-métabolique vis à vis de l’acide para-aminobenzoïque ; mais cette hypothèse est assez fragile car il n’agit pas sur d’autres germes que le bacille de Koch. Il ne possède pas les propriétés générales des dérivés salicylés. Des essais thérapeutiques ont montré son efficacité dabs les diverses formes de tuberculose ; mais il faut en administrer des doses importantes (de l’ordre de 20 g). Son action est lente et moins efficace que les composés plus moderne (streptomycine, isoniazide, etc.) 5. Quelques aspects de la synthèse industrielle
Réacteur : il est l’auteur des deux opérations de synthèse et de cristallisation. Pour la synthèse, la température du mélange se fait entre 60 et 80°C. A cette température, l’aspirine est soluble : le mélange est un liquide clair. La cristallisation est obtenue par refroidissement lent. Si la température baisse, la solubilité aussi et on obtient ainsi des cristaux (à 20°C l’aspirine est entièrement cristallisée). Il en résulte une suspension qu’il faut séparer : les liquides restant sont appelés jus mères. Filtre rotatif : il permet la séparation des cristaux avec les jus mères. On utilise dans l’industrie une centrifugation. Le modèle proposé ici marche en fonction de la pression : sur 7/8e de secteur, on diminue la pression, ce qui fait coller les cristaux d’aspirine ; sur le 1/8e de secteur restant, placé près du couteau, on remet une pression normale, ce qui fait décoller l’aspirine. Tube de séchage : il permet de débarrasser les particules solides du liquide résiduel. Le solide humide est introduit dans un fort courant d’azote chaud, ce qui conduit à 1. sécher les cristaux en vaporisant le liquide ; 2. transporter les cristaux vers le haut du tube. A la sortie du sécheur, on obtient une suspension de gaz et de particules solides qu’il faut séparer : c’est le rôle du cyclone. L’augmentation brutale du diamètre dans le cyclone ralentit le gaz. Soumises aux forces de gravité, les particules tombent alors dans la base du cyclone, tandis que le gaz sort par la tubulure supérieure. Tamis : dans l’industrie, un important atelier de traitement des solides produit différentes formes d’aspirines adaptées aux besoins pharmacologiques. En parallèle, une chaîne de tamisage donne différentes tailles de cristaux, une chaîne de broyage donne des poudres fines et une chaîne de compactage donne des granulés (voir 5. b. Conditionnement)
Colonne à distiller : la principale opération consiste ici à purifier le composé en récupérant l’anhydride acétique en excès et l’acide acétique formé.
Toutes les poudres d’aspirine ne se ressemblent pas. En sortie d’usine, la poudre d’aspirine se présente sous la forme d’un solide divisé dont les grains ont une taille précise, ou granulométrie. Cette granulométrie est une caractéristique physique essentielle du principe actif qui conditionne sa mise en forme pharmaceutique ultérieure.
! Granulométrie et biodisponibilité dans l’organisme
Pour être rapidement absorbée au niveau de l’estomac ou de l’intestin, un principe actif doit se dissoudre rapidement dans les liquides digestifs. Plus la poudre solide est divisée, plus la surface de contact avec ces liquides est grande et plus la dissolution est rapide. La taille des particules influence donc la vitesse d’arrivée du principe actif dans la circulation sanguine générale, et en cela, sa biodisponibilité.
! Granulométrie et disponibilité chimique
La forme des particules peut également affecter la stabilité chimique du principe actif : un produit sensible à l’hydrolyse ou à l’oxydation sera d’autant plus instable chimiquement que sa surface de contact exposée à l’humidité ambiante, ou aux gaz comme le dioxygène de l’air sera grande.
! Granulométrie et propriétés mécaniques
La taille des particules, qui influe sur leurs propriétés mécaniques, intervient dans le procédé de mise en forme du principe actif avec ses excipients, en particulier dans l’étape de granulation, pour les formes orales solides (écoulement des poudres, compressibilité, etc.).
! L’aspirine sous forme de poudre cristalline fine
Pour obtenir une granulométrie comprise entre 20 et 250 µm, les cristaux sont broyés en un solide pulvérulent très divisé qui convient bien à des formes effervescente. Sous l’action du CO2 libéré, la poudre se disperse très vite dans l’eau.
Lorsqu’elle se présente sous forme de petits parallélépipèdes (granulométrie comprise entre 180 et 710 µm), l’aspirine est par exemple vendue en vrac pour subir une transformation chimique ultérieure. La forme galénique résultante est vendue en sachets ou en gélules.
Les cristaux d’aspirine sont compactés dans un laminoir qui détruit leur structure cristalline. On obtient des plaques d’aspirine amorphes que l’on transforme en granulés par broyage puis tamisage. Ces granulés sont formées de grains irréguliers peu entourés d’air qui s’agglomèrent facilement. Ils se prêtent bien à une compression ultérieure dans les machines à fabriquer des comprimés.
MODE D’ACTION
C’est en 1971 que JohnVane (prix Nobel en 1982) et ses collègues proposèrent un mode d’action cohérent pour les prostaglandines, découvertes dès les années 1930. Les prostaglandines ne sont pas stockées mais libérées lorsqu’une cellule est lésée ou stimulée par d’autres hormones (inter-leukines). En fait, elles sont fabriquées en réponse à toute lésion ou stimulation cellulaire d’origine chimique ou mécanique ; les prostaglandines sont formées en petite quantité, dans de brefs délais. Leur dégradation est rapide et souvent synonyme d’inactivation. En raison de leur courte durée de vie, de quelques dizaines de secondes à trois minutes, on suppose qu’elles n’agissent que là où elles sont fabriquées. Elles sont dotées de propriétés biologiques multiples et parfois même contradictoire. Elles participent à de nombreux processus : l’inflammation – la contraction / relaxation de la stimulation lisse des vaisseaux sanguins – la réparation des vaisseaux sanguins – la pression sanguine – le flux sanguin rénal. De fait, il serait plus judicieux d’utiliser le terme élargi de prostanoïdes. Elles sont caractérisées par la formule suivante :
Leur formation passe par l’acide arachidonique, le grand précurseur des prostaglandines. Il s’agit d’un acide gras poly-insaturé majeur des cellules animales, qui est normalement localisé dans les membranes cellulaires sous forme estérifiée (phospholipides). Toute biosynthèse de prostanoïde devra donc commencer par l’hydrolyse de la fonction ester qui associe l’acide arachidonique au phospholipide. Cette étape est catalysée par une hydrolase spécifique, appelée phospholipase. Dès que l’acide arachidonique est libre, il entre dans le site actif d’un protéine enzymatique bi-fonctionnelle, appelée prostaglandine H synthase. Sa première fonction est cyclo-oxygénase : elle catalyse la fixation de deux molécules d’oxygène sur une molécule d’acide arachidonique tout en le cyclisant : le produit obtenu est noté PGG2 (2 pour le nombre d’insaturations). La PGG2 est réduite en PGH2 par la deuxième fonction enzymatique de la prostaglandine H synthase : cette réduction correspond à la transformation de la fonction hydroperoxyde en fonction hydroxyle.
Les prostaglandines PGD2, PGE2, PGF2α sont relativement ubiquistes et sont produites par dégradation de PGH2 et/ou par des isomérases/réductases assez mal connues. Les activités biologiques de ces trois prostaglandines dépendent de l’équipement en récepteurs spécifiques des tissus cibles mais l’on peut avancer des activités bien reconnues comme la régulation du taux d’AMP cyclique cellulaire pour la PGE2, la régulation du cycle veille-sommeil par la PGD2 et la contraction du muscle lisse utérin pour la prostaglandine PGF2α. Beaucoup plus spécifiques sont les deux prostaglandines sanguines et vasculaires, le thromboxane et la prostacycline (TxA2 et la PGI2). Chacun d’eux est formé par l’action d’un
isomérase spécifique, respectivement le thromboxane synthase et la prostacycline synthase. Le thromboxane est formé quasi uniquement par les plaquettes sanguines (ou thrombocytes, d’où le nom …) et la prostacycline est essentiellement formée par les cellules endothéliales et musculaires lisses de la paroi vasculaire. Ces deux prostaglandines ont une demi-vie biologique très brève (30 s. à 2 min.), ce qui est assurément un facteur régulateur important de leur puissante activité. Ils sont respectivement hydrolysés spontanément en TxB2 et 6-céto- PGF1α inactifs. Par des mécanismes complètement différents, le thromboxane et la prostacycline ont des activités exactement opposées. Le thromboxane est un puissant inducteur de la contraction des vaisseaux par action sur les cellules musculaires lisses vasculaires et il provoque l’agrégation des plaquettes sanguines qui le produisent. La prostacycline a un puissant effet relaxant au niveau des muscles lisses vasculaire et inhibe fortement l’agrégation plaquettaire, en augmentant l’AMP cyclique de ses cellules cibles. Le thromboxane et la prostacycline assurent la fluidité relative des plaquettes sanguines. 2. Action de l’aspirine sur la cyclo-oxygénase La PGH2 synthase classiquement décrite est une forme constitutive présente dans beaucoup de cellules et prête à fonctionner dès que l’acide arachidonique est présent. Il entre alors dans le site actif de l’enzyme constitué d’une poche où se côtoient les résidus sérine 530, tyrosine 385 (numérotation à partir de l’extrémité NH2 terminale) et un hème (jouant ici un rôle crucial dans la fonction hydroperoxydase de l’enzyme). Le résidu sérine 350 est le site d’action de l’aspirine en ce que la fonction alcool primaire des résidus sérine est acétylée aux dépens de l’aspirine, qui est transformée, elle, en acide salicylique.
Il en résulte que le site actif est encombré par le groupement acétyle, ce qui en ferme l’accès à l’acide arachidonique. La prostaglandine H synthase est alors inactivée irréversiblement.
On sait depuis 1976, grâce aux travaux de T. Miyamoto, que l’enzyme cyclo-oxygénase, constituée d’un unique longue chaîne polypeptidique avait une double fonction. Elle cyclise d’abord l’acide arachidonique, puis elle l’oxyde, conduisant à la formation de la PGG2 et enfin de la PGH2. En 1978, G.J. Roth et C.J. Siok montrèrent que l’aspirine n’inhibait de manière irréversible que l’activité de cyclisation en acétylant l’acide aminé sérine en position 530 de l’enzyme. Par là, l’aspirine bloque l’accès du site actif catalytique de l’enzyme à l’acide arachidonique, alors que l’acide salicylique n’occupe que transitoirement ce site. Dès son entrée dans le sang, la molécule d’acide acétylsalicylique est rapidement scindée en acide salicylique et radical acétyle. Ce qui voyage dans le flux sanguin est un mélange d’acide acétylsalicylique, d’acide salicylique et de radical acétyle. Toutefois, l’acide salicylique n’a pas d’activité sur l’enzyme cyclo-oxygénase ; aux concentrations obtenues, avec les doses thérapeutiques, il est vingt fois moins actif que l’aspirine. Sur le plan moléculaire, le résidu sérine du site actif (n°516 dans l’isoforme inductible) est également inhibable par l’aspirine mais il semble qu’une taille plus importante du site permette tout de même l’accès à l’acide arachidonique, ce qui permet son oxygénation partielle en un dérivé qui n’est pas un prostanoïde. Cette différence moléculaire est à la base de recherches pharmacologiques intenses pour la mise au point de molécules capables d’inhiber la forme inductible (essentiellement impliquée dans l’inflammation) sans atteindre la forme constitutive, pour ainsi sauvegarder la fonction "permanente" de biosynthèse des prostanoïdes qui a son utilité en dehors de la situation inflammatoire.
Le rôle des prostaglandines dans la douleur est largement confirmé. Les différentes prostaglandines peuvent présenter une certaine spécificité : les prostaglandines E provoquent une douleur prolongée alors que la prostacycline et les prostaglandines G2 et H2, puissants algogènes ont une action plus précoce et plus brève. Les mesures électro-physiologiques révèlent que les prostaglandines abaissent le seuil minimal de stimulation des récepteurs « de la douleur » (fibres amyéliniques). En effet, les prostaglandines, en se fixant sur des sites spécifiques existant sur ces fibres, provoquent une augmentation des seconds messagers intracellulaires (ions calcium, adénosine monophosphate cyclique), c’est à dire des composés qui transmettent les signaux chimiques depuis la membrane cellulaire jusqu’à l’intérieur des cellules. Les prostaglandines facilitent ainsi l’activité électrique des récepteurs de la douleur et abaissent leur seuil minimal de stimulation. Ainsi, une stimulation faible, non douloureuse au départ, le devient sous l’action hyperalgésique des prostaglandines. En inhibant l’activité des enzymes cyclo-oxygénases, l’aspirine empêche la production des prostaglandines au niveau des terminaisons nerveuses périphériques, à l’endroit même de la lésion. Elle prévient donc la sensibilisation des récepteurs de la douleur en remontant leur seuil de stimulation et diminue ainsi le passage des messages douloureux. L’aspirine calme de manière efficace et rapide les douleurs d’intensité modérée et particulièrement celles qui s’accompagnent d’une composante inflammatoire. Les douleurs viscérales sont moins sensibles à l’action de l’aspirine. Action hyperalgésique des prostaglandines
La serotonine, l’histamine, la bradykinine, molécules libérées lors d’une lésion tissulaire activent les récepteurs nerveux de la douleur. Les prostaglandines quant à elles sensibilisent ces récepteurs. Ainsi, une stimulation faible, non douloureuse au départ, le devient sous l’action des prostaglandines.
Une blessure superficielle, un traumatisme articulaire ou musculaire déclenche une réaction locale, la réaction inflammatoire. Des signes apparaissent : rougeurs, chaleur, œdème et douleur. Parfois, le corps entier est impliqué, la fièvre signe l’extension de la réponse inflammatoire. Les mécanismes mis en jeu sont d’une extrême complexité. Les protagonistes de l’inflammation agissent en cascades qui s’associent les unes avec les autres.
Mastocytes ; Phagocytes : médiateurs, leucotriènes ; Macrophages ; Lymphocytes ;
Les prostaglandines jouent un rôle majeur mais non exclusif dans le processus de l’inflammation. En acétylant les enzymes cyclo-oxygénases dans la membrane des cellules, l’aspirine inhibe la synthèse des prostaglandines. On notera que l’aspirine ne bloque pas la voie biochimique de synthèse des leucotriènes, molécules bien plus irritantes que les prostaglandines. L’aspirine réduit efficacement le gonflement et les symptômes inflammatoires mais elle est incapable d’empêcher leur progression vers la chronicité. De plus, elle n’exerce son action anti-inflammatoire que pour des doses très élevées. En réalité, l’action de l’aspirine ne s’explique pas seulement par l’inhibition de la synthèse des prostaglandines. L’aspirine empêche d’adhésion des polynucléaires neutrophiles nécessaires pour que les globules blancs quittent la circulation sanguine vers le site de l’inflammation. Ces protéines, dites Protéines G, sont des molécules clés pour la transmission des signaux chimiques à travers la membrane. En se fixant sur ces protéines G, l’aspirine empêche l’adhésion des neutrophiles entre eux et à la paroi vasculaire, donc leur migration vers le site inflammatoire.
Les membranes cellulaires comportent des molécules avec lesquelles l’aspirine interagit sans inhiber la synthèse des prostaglandines. L’aspirine bloque la transmission de signaux chimiques à travers les membranes cellulaires en se fixant sur des protéines clés de cette transmission, les protéines G. Elle inhibe ainsi la première étape de l’inflammation
globules blancs à la paroi des vaisseaux sanguins.
Toutefois, l’effet réduit de l’aspirine sur le site inflammatoire a été découvert en 1994 ! J. Vane et son équipe annoncèrent la découverte de l’existence de deux formes de cyclo-oxygénase, appelées COX1 et COX2. Dans les membranes des cellules, la COX2 n’existe pas de façon constitutive comme la forme COX1. Sa biosynthèse est induite par les stimuli chimiques inflammatoires : molécules-signaux échangées entre globules blancs, molécules activatrices de la multiplication cellulaire, composés toxiques sécrétés à l’intérieur des cellules, etc. L’aspirine est vingt à cinquante fois moins active sur la forme COX2 que sur la forme COX1 pour ce qui concerne l’inflammation. Cette faible affinité de l’aspirine pour COX2 explique la nécessité de fortes doses pour obtenir l’action anti-inflammatoire.
La température de notre corps est constamment maintenue aux environs de 37°C, par un équilibre entre production et perte de chaleur, sous le contrôle d’une partie de l’hypothalamus, situé dans le cerveau. Sous l’action de certaines substances dites pyrogènes, ce "thermostat" hypothalamique peut se déplacer à un niveau plus élevé et ainsi entraîner la fièvre en imposant à l’organisme une élévation de température. La fièvre est l’une des manifestations de l’inflammation ou de l’infection. Sur le site infectieux, des globules blancs de type macrophages sécrètent au cours de leur combat phagocytaire contre les bactéries, une molécule protéique, l’interleukine IL1, initialement désignée sous le terme de pyrogène leucocytaire. Véhiculée dans la circulation sanguine, l’interleukine s’infiltre dans le tissu cérébral, au voisinage de l’hypothalamus antérieur (exactement dans l’aire pré-optique) et y déclenche la production locale de prostaglandines. De nombreuses expériences ont conduit à penser que les prostaglandines E sont impliquées dans ce phénomène. Les prostaglandines induisent l’élévation du niveau du thermostat hypothalamique de l’organisme. Elles semblent agir par l’intermédiaire de l’AMPc. L’hypothalamus commande alors les mécanismes de production et de rétention de chaleur, par activation de son centre de thermogenèse et de son centre de thermolyse (activation musculaire par le système sympathique). Une preuve de l’action directe de l’aspirine au niveau de l’aire pré-optique a été apportée par son injection locale, qui a entraîné une défervescence chez l’animal fébrile. En inhibant l’activité des enzymes cyclo-oxygénases membranaires, l’aspirine bloque la production des prostaglandines par l’hypothalamus, ce qui provoque la mise en marche des mécanismes de perte de chaleur par sudation et dilatation des vaisseaux. La température chute et redevient normale. L’aspirine n’a toutefois aucune action sur la température basale (37°C), quand une personne non fébrile prend de l’aspirine pour calmer une douleur. Il n’y a ni vasodilatation, ni sudation, ni baisse de température corporelle. L’aspirine ne provoque pas d’hyperthermie et n’a aucune action quand la température du corps s’élève à la suite d’exercices musculaires ou de coup de chaleur. L’hypothèse de l’inhibition de la synthèse des prostaglandines pour expliquer les mécanisme d’action de l’aspirine n’est pas unanimement accepté. L’administration d’un agent bloquant les récepteurs des prostaglandines E2 ainsi que la destruction bilatérale de l’aire pré-optique chez le lapin ne s’opposant pas à l’action de l’interleukine IL1 qui déclenche la fièvre, d’autres structures centrales seraient alors mises en jeu. Lors du processus fébrile, les taux d’AMPc du liquide céphalo-rachidien doublent. La formation d’AMPc est inhibée par les
salicylates. L’action de l’aspirine s’expliquerait donc par celle de son dérivé métabolique principal, l’acide salicylique.
d) Aspirine et agrégation plaquettaire
Les plaquettes sont très abondantes dans le sang (de 250.000 à 500.000 par mm3). Lorsqu’elles rencontrent des parois vasculaires endommagées, ces petites cellules rondes (10-6 de diamètres) deviennent irrégulières et lancent des expansions en forme de doigts ou pseudopodes. Elles déchargent dans l’espace environnant le contenu de leurs granules qui sert à accélérer le processus de coagulation. Elles s’agrègent pour former un "thrombus" bouchant la lésion. Diverses molécules provoquent l’agrégation des plaquettes
diphosphate, l’adrénaline, le collagène du tissu conjonctif sous jacent de la paroi vasculaire exposé du fait de la blessure, et la thrombine, une enzyme produite au cours du processus de coagulation. Les expériences des années 1970 ont permis de préciser la biochimie de ce phénomène. Les molécules de collagène présentes dans la paroi des vaisseaux sanguins se lient à des récepteurs spécifiques en touchant la membrane des plaquettes. Cette liaison conduit à l’activation d’une enzyme membranaire qui catalyse la libération de l’acide arachidonique. Les plaquettes sont très riche en cyclo-oxygénases, les enzymes qui transforment cet acide gras en prostaglandines G et H et qui à leur tour sont transformées en thromboxane sous l’action d’une enzyme, la thromboxane-synthétase. Dans les premières phases de l’agrégation, les preuves expérimentales furent apportées que le thromboxane provoque les changements caractéristiques de la forme des plaquettes et la libération du matériel contenu dans leurs granules. Après la découverte en 1973 du thromboxane, on comprit l’action anti-agrégante de l’aspirine. Celle-ci, en inhibant, l’activité des cyclo-oxygénases plaquettaires empêche la synthèse de ce vasoconstricteur et super-inducteur de l’agrégation des plaquettes qu’est le thromboxane. Cet effet est exagéré du fait que les plaquettes, cellules sans noyau, sont dépourvues des gènes nécessaires à la biosynthèse renouvelée des enzymes cyclo-oxygénases bloquées par l’aspirine. Cet effet persiste toute la durée de vie des plaquettes, soit de sept à dix jours, d’autant que l’aspirine acétyle aussi les cyclo-oxygénases des mégacaryocytes, cellules mères nucléées des plaquettes dans la moelle osseuse, et que ce trouble est transmis ainsi aux plaquettes nouvellement libérées dans la circulation sanguine. Si l’on commençait à percevoir comment l’aspirine pouvait allonger le temps de saignement, on n’en restait pas moins étonné par une curieuse propriété des plaquettes. Comment ces minuscules cellules distinguent-elles les parois des vaisseaux sanguins sains ? La réponse fut apportée par les travaux de S. Moncade et de son équipe en 1976. Les cellules de la paroi interne vasculaire ont la particularité de posséder une enzyme spécifique, la prostacycline-synthétase, qui transforme les prostaglandines intermédiaires en prostacycline, puissant agent anti-agrégeant et vasodilatateur. La paroi interne des vaisseaux est sans cesse soumise aux forces de turbulence circulatoire, soit 8.000 litres de sang en rotation vasculaire par jour. Dans ce flux, des millions de collisions élastiques entre les plaquettes et la paroi des vaisseaux doivent se produire chaque seconde. Ces chocs pourraient constituer un stimulus d’agrégation, mais, dès que la prostaglandine H est produite par les plaquettes, elle est convertie par les cellules de la paroi interne en prostacycline qui empêche l’agrégation des plaquettes. L’effet inhibiteur de la prostacycline sur la fonction plaquettaire s’exerce par l’intermédiaire d’une stimulation d’une enzyme membranaire, l’adénylcyclase. En se fixant sur un récepteur spécifique de la membrane plaquettaire, la prostacyline active l’adénylcyclase qui catalyse la production d’AMPc, facteur essentiel à l’inhibition de
l’agrégation plaquettaire. Lorsque les taux intracellulaires d’AMPc sont élevés, les plaquettes ne s’agrègent pas. Si les plaquettes entrent en collision avec un segment de vaisseau sanguin ayant subi un dommage (de sorte que la couche interne des cellules de la paroi est détruite), il y aura mise en contact direct avec les structures sous-jacentes. Les plaquettes viennent se déposer à ce niveau en sécrétant le contenu de leurs granules. Il n’y aura pas de cellule de la souche interne abîmée pour fabriquer la prostacycline à action contraire au thromboxane. Les plaquettes s’agrègent avec le recrutement de nouvelles plaquettes circulantes et forment une sorte de caillot ou petit thrombus. Parmi les substances sécrétées, il y a en particulier une molécule, le facteur de croissance, qui stimule la multiplication des cellules constituant les fibres musculaires lisses de la paroi des vaisseaux et leur migration vers la couche interne. Les macrophages attirés par la sécrétion plaquettaire viennent se fixer sur le lieu de la lésion et contribuent à y accumuler du cholestérol et des lipides. C’est la formation de la plaque d’athérome. Intégrée à la paroi vasculaire, elle sera à l’origine de la progression de l’athérosclérose. Une augmentation progressive du volume de la plaque aboutira à l’obstruction des vaisseaux ou thrombose. Le caillot peut se diviser en petits fragments ou emboles qui, emportés par le courant, iront altérer ou obstruer des vaisseaux plus éloignés et de plus petit calibre. L’oblitération des vaisseaux entraînera la nécrose ou la mort du tissu qui ne sera plus irrigué et subira ce qu’il est convenu d’appeler un infarctus.
e) Aspirine et tolérance gastrique
La barrière de la muqueuse gastrique est constituée par trois lignes essentielles défense : un revêtement continu de mucus, une surface étanche formée par les cellules gastriques collées les unes aux autres, enfin l’action protectrice des prostaglandines, ligne de défense sur l’aspirine agit le plus. ! Le mucus est la première ligne de défense ; c’est un gel de polymère de glycoprotéines de
0,2 à 0,4 mm d’épaisseur. Totalement imperméable à la pepsine, il s’oppose à sa diffusion dans la paroi de l’estomac et participe à son inactivation. Bien que la pepsine solubilise la couche superficielle du mucus, elle n’a aucune possibilité de diffuser à travers le gel et d’atteindre les cellules de la muqueuse. L’eau diffuse très facilement entre les mailles du réseau du mucus. La perméabilité aux ions hydronium, responsables de l’activité de la sécrétion gastrique, est quatre fois celle de l’eau. Les ions H+ chargés positivement pourraient donc se comporter comme des agresseurs permanents de la muqueuse. Là, intervient la sécrétion d’ion bicarbonates (HCO -
pour donner de l’eau, les empêchant ainsi de diffuser vers la muqueuse. Les bicarbonates maintiennent un gradient d’acidité entre la muqueuse qui est neutre et le suc gastrique très acide (pH=2 environ). La perméabilité de l’aspirine est cinquante fois plus faible que celle de l’eau. Le rôle protecteur du mucus vis-à-vis de différentes substancves agressives tient à sa relative perméabilité. Plus une substance a un faible pouvoir de diffusion à travers le mucus, moins elle sera agressive. Mais de petites altérations de la couche du mucus peuvent abaisser les capacités de défense.
! La deuxième ligne de défense est le tissu gastrique lui-même formant une couche étanche
parce que les cellules qui le composent sont étroitement collées les unes aux autres par des jonctions spéciales, ou desmosomes. Ces cellules meurent, se renouvellent constamment et rompent à chaque instant la cohésion des joints. L’estomac humain perd plus de 500.000 cellules par minute et le revêtement gastrique se renouvelle complètement tous les trois jours. La barrière digestive doit sa surprenante résistance au renouvellement incessant de ses cellules. L’étanchéité de cette couche s’établit sur un équilibre entre
l’adhérence des cellules les unes aux autres et leur renouvellement permanent. Lorsque les cellules collent parfaitement les unes aux autres, il existe entre la muqueuse et la cavité gastrique une différence de potentiel électrique de 45 à 50 mV. La mesure de cette différence de potentiel permet d’apprécier la bonne intégrité de la paroi gastrique.
! La troisième ligne de défense a été découverte par A. Robert. L’aspirine provoque en
quelques heures des altérations de la musques. Si les prostaglandines sont dosées pendant la phase d’agression par l’aspirine, on constate que leur taux est abaissé. Depuis, d’autres travaux ont montré les multiples rôles des prostaglandines dans la protection des muqueuses digestives. La prostaglandine E2 et la prostacycline sont de puissants inhibiteurs de la sécrétion d’acide chlorhydrique et de pepsine. Parallèlement, elles sont capables de stimuler la sécrétion de bicarbonates et de mucus. Les prostaglandines exercent aussi, au niveau de l’estomac et du duodénum, un effet protecteur sur les cellules contre une variété de substances irritantes telle que les produits caustiques, l’acide chlorhydrique, l’éthanol, les anti-inflammatoires non stéroïdiens et les stéroïdiens. Le mécanisme de cet effet cytoprotecteur est encore mal défini.
L’utilisation thérapeutique de n’importe quel inhibiteur de la synthèse des prostaglandines induit toujours l’apparition de lésions érosives des parois gastriques et duodénales. Il est en tout cas maintenant admis que la protection des cellules contre les molécules ulcératives s’appuie contre la production locale de prostaglandines. L’aspirine bloque l’activité des enzymes cyclo-oxygénases des membranes des cellules, empêchant ou diminuant ainsi la production locale de prostaglandines E et de prostacyline, et provoque ainsi une hypersécrétion acide et diminution du taux d’oxygène dans le sang (hypoxie). Ces deux facteurs sensibilisent la muqueuse gastrique à une agression directe. Les prostaglandines ont aussi pour action d’accroître la sécrétion de bicarbonate et de mucus protecteur. De plus, l’inhibition des enzymes cyclo-oxygénases dévie le métabolisme de l’acide arachidonique vers la voie de synthèse des leucotriènes sont des molécules vasoconstrictrices, responsables de dommages de la muqueuse gastrique. Les radicaux libres pourraient jouer un rôle dans la genèse des lésions. Le modèle de la poche gastrique, proposé par H.W. Davenport, a permis l’étude d’agents intervenant par contact avec la muqueuse avant toute absorption intestinale et passage dans le sang. Dans les conditions normales, la barrière gastrique est très résistante aux solutions acides. En revanche, une solution acide comparable à celle du suc gastrique devient agressive si on ajoute une faible quantité d’aspirine. Les effets agressifs de l’aspirine ne peuvent s’exercer qu’en milieu acide. Dans un milieu acide, la majorité des molécules d’aspirine est non-ionisée, liposoluble et diffuse rapidement dans les membranes lipoprotéinique des cellules de la muqueuse. A l’intérieure des cellules où le pH est voisin de 7,5, les molécules d’aspirine s’ionisent et libèrent des ions hydronium. La vitesse de diffusion des molécules d’aspirine dépend en premier lieu de l’acidité de leur environnement dans la poche gastrique. Les expériences ont montré qu’en présence d’alcool dans l’estomac, la capacité de l’aspirine de "briser" la barrière muqueuse est augmentée, même si l’activité gastrique est basse. L’aspirine provoque une augmentation de la vitesse de renouvellement des cellules de la paroi stomacale et duodénale avec une desquamation avant leur maturité. La conséquence est la sécrétion d’un mucus peu fonctionnel qui vient s’ajouter à la détérioration du mucus par contact direct avec les molécules d’aspirine non ionisées. L’effondrement de la barrière muqueuse est responsable des lésions ou de leur aggravation. Ainsi, en présence d’aspirine (360mg/100mL) en milieu acide, la muqueuse devient perméable. Les ions H+ diffusent à travers la muqueuse et atteignent le tissu interstitiel sous-jacent où ils provoquent la libération de molécules telle l’histamine, responsable d’un
accroissement de la sécrétion acide et de la création de pepsine. La pepsine présente, activée en milieu acide, entraîne une destruction locale des cellules de la muqueuse. L’ensemble des molécules et ions libérés peut aboutir à la destruction en profondeur de la paroi des vaisseaux, d’où hémorragie et asphyxie avec extension éventuelle de la lésion. Dans le cas d’une agression par l’aspirine ne provoquant pas de multiples lésions et ulcérations, les mécanismes physiologiques normaux suffisent pour protéger la muqueuse gastrique, comme le confirme l’observation expérimentale. H.W. Davenport avait montré en 1967 qu’une dose d’aspirine de 500 mg provoque dans l’estomac humain une chute de la différence de potentiel électrique cellulaire pendant 15 minutes suivie d’une remontée à la normale. L’administration d’aspirine à doses usuelles provoque en quelques heures des lésions et petites ulcérations dispersées. Si on fait absorber des doses élevées, les lésions se multiplient pour ensuit régresser rapidement. A la phase d’agression caractérisée par l’effondrement du mucus devenu plus perméable, la mort d’un certain nombre de cellules gastriques avec perte de l’étanchéité du tissu gastrique ainsi que la diffusion des ions H+ succède rapidement celle de la réparation. La pepsine et l’acide chlorhydrique sont à nouveau évacués dans la cavité gastrique. La sécrétion des prostaglandines reprend, ainsi que celle du bicarbonate et du mucus. Des cellules nouvelles se forment, la bonne adhérence des cellules s’opère à nouveau. La différence de potentiel électrique entre la muqueuse et la cavité gastrique revient à son niveau normal de 45 à 50 mV. Il peut se produire un phénomène d’adaptation à l’agression. Ce fait a été vérifié chez ds personnes fort consommatrices d’aspirine. Les gastroscopies ont montré dans 40 à 60 % des cas, des petites lésions dispersées. Même en prises répétées, l’aspirine provoque très rarement des hémorragies vraies et des ulcères d’estomac. Une fibroscopie de l’estomac pratiquée 24 heures après la dernière des 21 prises consécutives d’une même dose ne montre que d’infimes lésions ou pas de lésions du tout. 4. Elimination de l’aspirine au sein de l’organisme 70 à 80 % des molécules d’aspirine sont hydrolysées en acide salicylique et en acide acétique. Il y a alors combinaison de ces métabolites avec des molécules présentes dans le milieu de dégradation :
ACTUALITE DU MEDICAMENT
1. Historique 1897 - le 1er octobre : Félix Hoffmann invente l’Aspirine 1899 - le 23 janvier : la firme Bayer dépose le nom de marque Aspirin® le
1er février : Bayer dépose le brevet n°36433 de fabrication et de vente de l’Aspirin®
1900 - le 27 février : aux Etats-Unis, le brevet d’invention de l’acide acétylsalicylique
n°644,077 est attribué à Félix Hoffmann.
1900 : Bayer produit 4.251 kg d’Aspirin® 1904 : Bayer produit 25.823 kg d’Aspirin® 1908 : L’aspirine est commercialisée en France sous le nom de Rhodine® (3.554 kg) par la
société chimique des Usines du Rhône (SCUR).
1914 : La SCUR produit 33.188 kg de Rhodine® 1915 : Le nom de marque Aspirine Usines du Rhone® est déposé par la SCUR 1918 : La SCUR produit 68.928 kg d’Aspirine Usines du Rhone®, soit 28.000 tubes de 20
1919 : Le nom de marque Aspirin® tombe dans le domaine public 1986 : Consommation mondiale de médicaments contenant de l’aspirine : 40.000 t (dont
1991 : Consommation mondiale de médicaments contenant de l’aspirine : ??.000 t (dont
USA 12.000 t – en France, 30 comprimés ou sachet/an/personne).
1994 : Consommation mondiale d’aspirine (sans excipients) : 11.600 t (dont 909 t en France)
soit 36.250 millions de comprimés, sachets, gélules … consommés dans le monde (dont 1.734 millions en France)
En 1994, la production française d’aspirine atteignait 7.000 t avec plus de 50 préparations galéniques différentes. 2. Les concurrents de l’aspirine Les concurrents directs de l’aspirine sont les anti-inflammatoires non stéroïdiens. Le terme « stéroïde » désigne un famille chimique de molécules très largement répandues dans le règne
animal et végétal. La structure chimique de tout stéroïde s’apparente à celle d’une molécule mère : gonane.
Le nom de famille stéroïde dérive du mot « stérol ». Premières substance stéroïdes isolées au XIXe siècle, les stérols doivent leurs noms à leurs propriétés physico-chimique : obtenus après extraction, sous forme solide cristallisée, ils fondent à des températures supérieures à 100°C. La dénomination « stérol » fût donc composée à partir de la racine grecque stéros [solide] et la désinence ol propre aux alcools. Exemple de stéroïdes non hormonaux : cholestérol ; exemple de stéroïdes hormonaux : progestérone – testostérone. Les plus puissants anti-inflammatoires sont des hormones stéroïdiennes, les glucocorticoïdes, comme la cortisone, le dexaméthasone ou la flucinolone. Ces hormones ont cependant beaucoup d’effets secondaires indésirables (toxicité digestive, perturbations du métabolisme, immuno-dépression, etc.) qui leur dont préférer les anti-inflammatoires non stéroïdiens, tels que l’aspirine.
Cette molécule centenaire est née d’un heureux hasard. A la suite d’une erreur de livraison, deux médecins strasbourgeois découvrirent en 1886 les propriétés antipyrétiques de l’acétanilide. L’acétanilide est alors synthétisée à partir de l’aniline, molécule de l’industrie des colorants. Un médicament naît, l’antifébrine. Les dérivés de l’aniline déjà connus (comme la phénacétine) vont alors susciter l’intérêt des médecins : En 1893, le médecin J. von Mehring publie les résultats de ses études sur le paracétamol. En raison de leur toxicité et bien que le paracétamol se montrât plus sûr, ces dérivés de l’aniline ne connurent pas le succès de l’aspirine. L’histoire rebondit en 1948-49 lorsque les chercheurs américains B.B. Brodie, F.B. Flinn et A.E. Axelrod découvrirent que l’acétanilide et la phénacétine sont transformés par l’organisme en deux métabolites dont le paracétamol. Ils démontrèrent ensuite que le paracétamol est le métabolite actif contre la douleur et la fièvre et que les autres métabolites induisent les effets toxiques observés sur le sang. Le paracétamol est introduit en 1955 et en France en 1957. Les effets thérapeutiques du paracétamol (antalgique et antipyrétique) sont liées à son action sur les prostaglandines : ils inhibe la biosynthèse de certaines prostaglandines, mais selon un mécanisme réactionnel différent de celui d l’aspirine.
Jusqu’en 1950, on avait essentiellement recours à l’aspirine et à l’acide salicylique pour soigner les états inflammatoires et les rhumatismes sévères. Toutefois, administrée à forte dose, l’aspirine provoquait de sérieux désordres gastriques. A partir de 1950, la découverte de la cortisone et de son action spectaculaire sur la polyarthrite rhumatoïde donnât naissance à de nouvelles thérapies efficaces (également dans les cas de rhumatisme articulaire aigu). Ces corticothérapies s’accompagnent cependant d’effets indésirables pour le patient. Chimistes et médecins continuèrent à chercher de nouvelles familles chimiques mieux tolérées. Dans les années 1960, on découvrit ainsi l’acitivié anti-inflammatoire d’une série de molécules dérivées de l’acide propioniques (CH3-CH2-COOH). L’ibuprofène est le chef de file de cette nouvelle famille d’anti-inflammatoires non stéroïdiens. Il est adopté comme médicament aux Etats-Unis depuis 1969, en France depuis 1972. L’acitivité anti-inflammatoire de ces molécules résulte de leur action sur la biosynthèse de certaines prostaglandines : elles sont en effet capables de bloquer la même étape de biosynthèse que l’aspirine. 3. Vers de nouveaux anti-inflammatoires Retournons aux prostaglandines ! Il existe deux formes distinctes de l’enzyme cyclo-oxygénase (COX) : un forme constitutive (COX1) présente à un taux constant dans la plupart des tissus et activant la production des prostaglandines nécesaires au fonctionnement physiologique normal ; et puis une forme inductible (COX2) dont la fabrication n’intervient que lors de l’inflammation. En fait, seule COX1 est responsable de la production de prostaglandines ayant un rôle protecteur pour l’appareil gastro-intestinal. COX2 n’a aucun effet sur l’estomac et il est clair aujourd’hui que l’augmentation de COX2 est l’une des clés conduisant à certains des symptômes de l’inflammation. Les deux formes possèdent des propriétés similaires et toutes deux sont modifiées par l’aspirine par le même mécanisme. On peut même généraliser à tous les anti-inflammatoires non stéroïdiens. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens se révèlent plus puissants contre COX1 que contre COX2 (ils inhibent la première à une dose moindre que ce qu’exige la seconde), mais aucun n’exerce une forte action sélective sur COX2. En revanche, plusieurs composés expérimentaux se sont révélés plus de cent fois plus actifs contre COX2 que contre COX1 (DUP 697, NS-398, Flosulide). Ainsi, tout en conservant l’action anti-inflammatoire et antalgique des anti-inflammatoires non stéroïdiens, ces derniers ne causent pas de dommage gastro-intestinal.
L’aspirine inhibe de manière irréversible COX1 par acétylation du résidu sérine ; elle empêche l’accès du site actif (long canal hydrophobe)
prostaglandines ; enfin, elle a une forte affinité pour COX1 et une faible pour COX2. 4. L’aspirine : un espoir pour de nouvelles maladies
En 1994, des chercheurs de l’université de Yale ont fait une étude sur l’aspirine qui décriviat pour la première fois un effet inhibiteur de la composante salicylée de l’acide acétylsalicylique sur la NKχB, un « facteur nucléaire », c’est à dire une protéine activée par des bactéries et des cytokines et qui joue un rôle important dans de nombreuses réactions inflammatoires et immunologiques. Cette équipe de chercheurs a démontré en outre que les concentrations fortes d’aspirine avaient un effet sur la multiplication du virus HIV in vitro, car ce virus et quelques autres utilisent la NKχB pour se multiplier. Si cette protéine est inhibée par l’aspirine, la formation du virus est freinée. Il est toutefois difficile d’espérer que l’aspirine puisse démontrer un effet bénéfique dans la prise en charge du sida !
L’aspirine pourrait aussi avoir un effet préventif vis-à-vis du cancer. On suppose que le mécanisme d’action repose sur l’inhibition de la synthèse des prostaglandines, étant donné que certaines prostaglandines jouent un rôle important dans la genèse et le développement des cancers. Il existe de très nombreuses données recueillies chez l’animal et aussi des observation faites chez l’homme, parfois fortuitement. Par exemple, on a interrogé a posteriori des cancéreux sur leurs habitudes en matière de prise d’aspirine et une comparaison avec un groupe témoin a montré que celui-ci utilisait plus rarement de l’aspirine. De plus, une enquête menée auprès de rhumatisants américains prenant régulièrement de l’aspirine a montré que le risque de cancer de l’intestin était moindre chez ces patients que dans le reste de la population. Ces observations ne permettent toutefois pas encore de se prononcer sur la durée de traitement nécessaire ou sur la dose à recommander ; il faut encore attendre les résultats des études en cours. A l’heure actuelle, la seule méthode préventive probante repose sur le dépistage régulier du cancer.
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• G. WEISSMANN, L’aspirine, Pour la Science – Paris, 161, 1991 Informations complémentaires
• Codex de la pharmacie
• Entreprises Rhône-Poulenc, Bayer et UPSA
Un grand merci à Isabelle Joffre-Rolloy pour son attention et sa disponibilité.
Partie expérimentale
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• J. QUENTIN, Bulletin de l’Union des Physiciens, ? – Paris, 776, vol. 89, 1995
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